Photo du Cabildo le 25 mars 2009 publié par Clarin
Cette année en effet, 25 ans après le retour à la Démocratie, la manifestation a été particulièrement suivie puisque la foule occupait toute la Plaza de Mayo (elle-même très vaste) et toute la Avenida de Mayo jusqu’à Plaza del Congreso éloigné de 11 cuadras (voir Trousse lexicale d'urgence, en partie centrale de la Colonne de droite).
Pour beaucoup, les slogans portent sur des revendications liées à l’événement mais les vandales (des gens sincères et inconscients ou des provocateurs) se sont aussi exprimés sur des faits d’actualité (conflit agraire, crise de l’école) et généralement beaucoup de revendications sociales, y compris concernant des pays étrangers (Venezuela, Bolivie, Cuba...).
La Ville de Buenos Aires va devoir dépenser de grosses sommes pour la remise en état de ces parois historiques dont le blanc immaculé est une des fiertés touristiques et architecturales de Plaza de Mayo. Ces murs ne supportent pas les peintures synthétiques modernes, ils doivent être peints à la chaux. Et c’est désormais ainsi à chaque manifestation d’ampleur sur la place, qui est le lieu de rassemblement symbolique (et donc incontournable) de toutes les manifestations politiques, même les plus convenues, comme la prise de fonction d’un chef d’Etat. Pour limiter les effets de ce vandalisme, le Musée du Cabildo (qui raconte l’histoire de la Guerre d’Indépendance, qu’on appelle Revolución de Mayo ou Revolución del 1810) a mis en place un mur d’expression libre à l’intérieur du musée mais en pure perte, les vandales préfèrent la façade !
Pourtant le graffiti reste peu pratiqué à Buenos Aires au regard de ce qui existe dans nos grandes villes d’Europe et le tag y est presque inconnu. En revanche, ce qu'on appelle là-bas les murales (oeuvres picturales appliquées sur les murs, publics ou privés, en ville) sont très communs et ce sont des oeuvres populaires très respectées (on voit peu d’éclats, il n’y a presque jamais de commentaires inscrits sur l’oeuvre et jamais d’affichage sauvage appliqué dessus et pourtant l’affichage sauvage à Buenos Aires, ce n’est pas ça qui manque !).
Le Cabildo, construit dans ses premiers plans en 1606, sur l’emplacement désigné à cet effet par Juan de Garay, second fondateur de la ville en 1580, fut, de 1776 à 1822, le siège de la gouvernance coloniale, le lieu du pouvoir administratif, judiciaire et économique du Vice-Royaume du Río de La Plata. Il fut à la fois un palais officiel, un octroi et un hôtel des impôts, un tribunal et une prison. Il cessa d’être ce siège du pouvoir après 12 ans de guerre d’indépendance lorsque le dernier Vice-Roi regagna l’Espagne avec le reste de ses troupes. La Présidence de la République argentine s’est installée en face du Cabildo, à l’autre extrémité de Plaza de Mayo, dans la Casa Rosada.
Le Cabildo est ainsi l’un des rares grands bâtiments d’architecture coloniale qui subsiste dans Buenos Aires, avec le couvent Santa Catalina (juste à côté du Centro Cultural Borges et des Galerias Pacífico), la Manzana de las Luces (ancien domaine de la Compagnie de Jésus dans le quartier de Monserrat) et l’église Nuestra Señora del Pilar (plus connue sous son nom de tous les jours : Iglesia del Pilar) dans le quartier de la Recoleta. Sur Plaza de Mayo, la Cathédrale de Buenos Aires est aussi un édifice qui date de l’époque coloniale (on le voit quand on entre à l’intérieur) mais elle est depuis longtemps privée de son aspect colonial. Il faut se placer de biais pour apercevoir la coupole bleue qui la surmonte et que la façade néo-classique cache lorsqu’on regarde le bâtiment en face, depuis la Place. Très tôt, en 1812, le tout premier gouvernement de l’Argentine indépendante, dirigé par le Comodore Rivadavia, a décidé d’adjoindre à cette cathédrale une nouvelle façade, commandée à l’architecte français Prospère Catelin (Próspero), qui dessina et fit construire en 1822 une colonnade classique rappelant l’église de la Madeleine à Paris (voir le site de La Madeleine et celui de la Catedral Metropolitana).
Depuis 1822 et son abandon par les autorités espagnoles, le Cabildo a souvent été modifié au gré des grands travaux urbanistiques de la Capitale.
Le voici ci-contre, entier, photographié en 1864, avec ses 11 arcades, 5 de chaque côté de l'arc central, sous la tour, et on voit que la pyramide, ce monument couronné d'une statue qui représente la liberté en Minerve-Athéna toute armée, était encore à cette époque placée juste devant le Cabildo (magnifique pied de nez à l'Espagne coloniale). La pyramide se dresse aujourd'hui de l'autre côté de la place, devant la Casa Rosada, et c'est autour de ce symbole fort de l'histoire argentine que tous les jeudis, les Mères de la Place de Mai continuent de tourner en mémoire de leurs enfants disparus pendant la Dictature...
Toutes les modifications subis par le Cabildo en ont réduit progressivement l’amplitude avec un sens du symbole historico-politique d’une rare constance. Le bâtiment actuel, avec sa recova (la galerie en arcades), date de 1725, soit 40 ans avant que Buenos Aires ne devienne capitale du tout nouveau Vice-Royaume institué en 1776. La construction a été achevée avec le premier faîtage de la tour centrale, en 1764. Jusqu’en 1884, qui vit le percement de la Avenida de Mayo décrété par le grand maire de Buenos Aires que fut Torcuato de Alvear (le Haussman portègne), le Cabildo conserva toutes ses arcades. Plus tard, en 1932, ce fut le percement de la Diagonal Sur, dans le cadre des travaux qui marquèrent les 400 ans de la première fondation, en 1936, l’année qui vit l’élargissement de la rue Corrientes (qui devint alors la Avenida Corrientes) et l’érection de l’Obélisque sur la nouvelle Plaza de la República (en imitation de l’Obélisque du National Mall de Washington et non pas de l’Obélisque égyptien de la Place de la Concorde à Paris. En 1936, l’imitation de la Place de la Concorde du pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen n’était pas envisageable pour le gouvernement en place en Argentine !). En 1932, après le percement de la Diagonal Norte en 1929, la Diagonal Sur vint taper directement sur l’aile gauche (sud) du Cabildo. Trois arcades furent supprimées pour respecter la symétrie avec le côté nord, amputé en 1884.
Aujourd’hui, le Cabildo ne compte plus que 5 arcades, il a gardé sa tour couronnée de sa coupole bleue, posée là en 1880 par un autre architecte français, Pierre Benoît. Et c’est aussi à un architecte français qu’on doit une grande partie du quartier actuel de Palermo (el Parque del Tres de Febrero, le Zoo, le jardin botanique et les places qui entourent tout ce poumon vert), Charles Thays, que les Sud-Américains appellent Carlos Thays puisqu’il se fit naturaliser argentin (prononcez Taïs).
Comme très souvent depuis plusieurs années, lorsqu’une manifestation importante envahit la Plaza de Mayo, qui sépare les quartiers de Monserrat et de San Nicolás, le coeur historique de Buenos Aires qu'on appelle le micro-centro, la façade du Cabildo, qui s’élève à l’extrémité ouest de cette place emblématique, a été couverte de graffitis à hauteur d’homme mardi dernier, le 24 mars, date anniversaire du coup d’Etat qui avait instauré la dernière dictature militaire en Argentine (1976-1983).
Cette année en effet, 25 ans après le retour à la Démocratie, la manifestation a été particulièrement suivie puisque la foule occupait toute la Plaza de Mayo (elle-même très vaste) et toute la Avenida de Mayo jusqu’à Plaza del Congreso éloigné de 11 cuadras (voir Trousse lexicale d'urgence, en partie centrale de la Colonne de droite).
Pour beaucoup, les slogans portent sur des revendications liées à l’événement mais les vandales (des gens sincères et inconscients ou des provocateurs) se sont aussi exprimés sur des faits d’actualité (conflit agraire, crise de l’école) et généralement beaucoup de revendications sociales, y compris concernant des pays étrangers (Venezuela, Bolivie, Cuba...).
La Ville de Buenos Aires va devoir dépenser de grosses sommes pour la remise en état de ces parois historiques dont le blanc immaculé est une des fiertés touristiques et architecturales de Plaza de Mayo. Ces murs ne supportent pas les peintures synthétiques modernes, ils doivent être peints à la chaux. Et c’est désormais ainsi à chaque manifestation d’ampleur sur la place, qui est le lieu de rassemblement symbolique (et donc incontournable) de toutes les manifestations politiques, même les plus convenues, comme la prise de fonction d’un chef d’Etat. Pour limiter les effets de ce vandalisme, le Musée du Cabildo (qui raconte l’histoire de la Guerre d’Indépendance, qu’on appelle Revolución de Mayo ou Revolución del 1810) a mis en place un mur d’expression libre à l’intérieur du musée mais en pure perte, les vandales préfèrent la façade !
Pourtant le graffiti reste peu pratiqué à Buenos Aires au regard de ce qui existe dans nos grandes villes d’Europe et le tag y est presque inconnu. En revanche, ce qu'on appelle là-bas les murales (oeuvres picturales appliquées sur les murs, publics ou privés, en ville) sont très communs et ce sont des oeuvres populaires très respectées (on voit peu d’éclats, il n’y a presque jamais de commentaires inscrits sur l’oeuvre et jamais d’affichage sauvage appliqué dessus et pourtant l’affichage sauvage à Buenos Aires, ce n’est pas ça qui manque !).
Le Cabildo, construit dans ses premiers plans en 1606, sur l’emplacement désigné à cet effet par Juan de Garay, second fondateur de la ville en 1580, fut, de 1776 à 1822, le siège de la gouvernance coloniale, le lieu du pouvoir administratif, judiciaire et économique du Vice-Royaume du Río de La Plata. Il fut à la fois un palais officiel, un octroi et un hôtel des impôts, un tribunal et une prison. Il cessa d’être ce siège du pouvoir après 12 ans de guerre d’indépendance lorsque le dernier Vice-Roi regagna l’Espagne avec le reste de ses troupes. La Présidence de la République argentine s’est installée en face du Cabildo, à l’autre extrémité de Plaza de Mayo, dans la Casa Rosada.
Le Cabildo est ainsi l’un des rares grands bâtiments d’architecture coloniale qui subsiste dans Buenos Aires, avec le couvent Santa Catalina (juste à côté du Centro Cultural Borges et des Galerias Pacífico), la Manzana de las Luces (ancien domaine de la Compagnie de Jésus dans le quartier de Monserrat) et l’église Nuestra Señora del Pilar (plus connue sous son nom de tous les jours : Iglesia del Pilar) dans le quartier de la Recoleta. Sur Plaza de Mayo, la Cathédrale de Buenos Aires est aussi un édifice qui date de l’époque coloniale (on le voit quand on entre à l’intérieur) mais elle est depuis longtemps privée de son aspect colonial. Il faut se placer de biais pour apercevoir la coupole bleue qui la surmonte et que la façade néo-classique cache lorsqu’on regarde le bâtiment en face, depuis la Place. Très tôt, en 1812, le tout premier gouvernement de l’Argentine indépendante, dirigé par le Comodore Rivadavia, a décidé d’adjoindre à cette cathédrale une nouvelle façade, commandée à l’architecte français Prospère Catelin (Próspero), qui dessina et fit construire en 1822 une colonnade classique rappelant l’église de la Madeleine à Paris (voir le site de La Madeleine et celui de la Catedral Metropolitana).
Depuis 1822 et son abandon par les autorités espagnoles, le Cabildo a souvent été modifié au gré des grands travaux urbanistiques de la Capitale.
Le voici ci-contre, entier, photographié en 1864, avec ses 11 arcades, 5 de chaque côté de l'arc central, sous la tour, et on voit que la pyramide, ce monument couronné d'une statue qui représente la liberté en Minerve-Athéna toute armée, était encore à cette époque placée juste devant le Cabildo (magnifique pied de nez à l'Espagne coloniale). La pyramide se dresse aujourd'hui de l'autre côté de la place, devant la Casa Rosada, et c'est autour de ce symbole fort de l'histoire argentine que tous les jeudis, les Mères de la Place de Mai continuent de tourner en mémoire de leurs enfants disparus pendant la Dictature...
Toutes les modifications subis par le Cabildo en ont réduit progressivement l’amplitude avec un sens du symbole historico-politique d’une rare constance. Le bâtiment actuel, avec sa recova (la galerie en arcades), date de 1725, soit 40 ans avant que Buenos Aires ne devienne capitale du tout nouveau Vice-Royaume institué en 1776. La construction a été achevée avec le premier faîtage de la tour centrale, en 1764. Jusqu’en 1884, qui vit le percement de la Avenida de Mayo décrété par le grand maire de Buenos Aires que fut Torcuato de Alvear (le Haussman portègne), le Cabildo conserva toutes ses arcades. Plus tard, en 1932, ce fut le percement de la Diagonal Sur, dans le cadre des travaux qui marquèrent les 400 ans de la première fondation, en 1936, l’année qui vit l’élargissement de la rue Corrientes (qui devint alors la Avenida Corrientes) et l’érection de l’Obélisque sur la nouvelle Plaza de la República (en imitation de l’Obélisque du National Mall de Washington et non pas de l’Obélisque égyptien de la Place de la Concorde à Paris. En 1936, l’imitation de la Place de la Concorde du pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen n’était pas envisageable pour le gouvernement en place en Argentine !). En 1932, après le percement de la Diagonal Norte en 1929, la Diagonal Sur vint taper directement sur l’aile gauche (sud) du Cabildo. Trois arcades furent supprimées pour respecter la symétrie avec le côté nord, amputé en 1884.
Aujourd’hui, le Cabildo ne compte plus que 5 arcades, il a gardé sa tour couronnée de sa coupole bleue, posée là en 1880 par un autre architecte français, Pierre Benoît. Et c’est aussi à un architecte français qu’on doit une grande partie du quartier actuel de Palermo (el Parque del Tres de Febrero, le Zoo, le jardin botanique et les places qui entourent tout ce poumon vert), Charles Thays, que les Sud-Américains appellent Carlos Thays puisqu’il se fit naturaliser argentin (prononcez Taïs).