L'un des squatts emblématiques liés aux émeutes de Villa Soldati au début du mois vient de trouver un curieux dénouement. Une trentaine de personnes s'étaient en effet installées sur un terrain public dont la République Argentine laissait l'usufruit au Club Albariño du quartier de Villa Lugano, ce club dont l'un des dirigeants avait été désigné par Página/12 il y a quelques jours comme mêlé aux agitateurs du Parque Indoaméricano à Villa Soldati (voir mon article du 15 décembre 2010 à ce sujet). Ces squatteurs, qui avaient toujours répondu non à toutes les offres de négociation du Gouvernement fédéral et refusé les propositions d'examen de logement qui leur étaient faites, ont pris la fuite dans la nuit après que la police s'est mise en devoir d'exécuter les 16 mandats d'arrêt délivrés par la justice contre certains d'entre eux. 5 arrestations ont tout de même été réalisées, ce qui porte à 7 le nombre de personnes écrouées dans cette affaire (il y avait déjà eu deux arrestations préalables, celle d'un Argentin de 45 ans et celle d'un Paraguayen de 26 ans).
Les actes d'instruction réalisés par les forces de l'ordre et la justice ferait apparaître les dessous douteux de toute l'affaire : un gang d'escrocs, avec des casiers judiciaires plus vraiment vierges, aurait monté l'occupation des lieux en promettant des actes de vente des terrains ainsi squattés, sous couvert de liens privilégiés qu'ils auraient entretenus (ou qu'ils entretenaient) avec tels ou tels hauts responsables des services techniques de la Ville de Buenos Aires. Or ces derniers temps, les scandales de corruption ont si bien éclaboussé la gestion des affaires immobilières dans la Ville de Buenos Aires que de telles protections ont pu paraître crédibles à une population pauvre qui n'a plus les moyens de se loger à Buenos Aires. Le Gouvernement actuel de la Ville Autonome de Buenos Aires favorise en effet la spéculation immobilière et les projets des promoteurs en direction des entrprises et des classes aisées et fortunées. Les escrocs auraient ainsi engrangé des dessous de table, d'un montant qui se situerait entre 300 000 et 500 000 pesos argentins, pour garantir à des gens démunis l'attribution d'un titre de propriété imaginaire.
Ce qui ajoute bien sûr de l'eau au moulin du Gouvernement, qui continue de dire par la bouche de la nouvelle Ministre de la Sécurité que tous ces troubles à l'ordre public servent bien les intérêts politique de l'opposition, représentée par Mauricio Macri, lequel s'est opposé il y a encore quelques jours au fait que la Police ne soit pas armée lors de ses interventions dans de telles situations (1).
Dans l'autre affaire d'opération de maintien de l'ordre à bavure mortelle, celle de la mort du militant du Partido Obrero Mariano Esteban Ferreyra, l'enquête avance : ce sont maintenant 7 inculpés qui sont sous les verroux. Ils sont poursuivis pour homicide qualifié et tentative d'homicide qualifié. Ils risquent la prison à perpétuité (voir mes articles sur la mort de cet ouvrier à la mi-octobre 2010).
Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12 sur l'affaire du Club Albariño
lire l'article de Página/12 sur les suites de l'enquête sur le meurtre de Ferreyra
(Página/12 est pro-gouvernemental)
lire l'article de Clarín sur l'affaire du Club Albariño
lire l'article de Clarín sur les suites de l'enquête sur le meurtre de Ferreyra
(Clarín est violemment hostile à la Présidente de la République)
lire l'article de La Nación sur l'affaire du Club Albariño
lire l'article de La Nación sur les suites de l'enquête sur le meurtre de Ferreyra
(La Nación est un journal d'opposition, libéral, mais qui prend peu à peu des distances avec la personne et la politique de Mauricio Macri, dont il soutenait la campagne électorale en 2007).
(1) Au début du mois, des échanges de coups de feu ont causé la mort de deux manifestants immigrés lors d'une opération de maintien de l'ordre monté conjointement par la Police Fédérale et la Police Métropolitaine (celle qui dépend du Gouvernement de la Ville de Buenos Aires). Il s'en était suivi un retrait complet de la Police Fédérale, qui n'a plus apporté son soutien aux opérations relevant du maintien de l'ordre autour du campement illégal de Villa Soldati, au sud de la capitale argentine, et des déclarations fortes du Gouvernement fédéral sur la nécessité de traiter ces occupations illégales de manière pacifique. Ce qui finit par arriver lorsque la Gendarmerie se déploya avec les grands moyens autour du campement, le temps que ses occupants soient recensés par les services sociaux fédéraux, au grand dam de Mauricio Macri, qui n'avait pas de mots assez durs pour discréditer la politique menée au niveau fédéral. Voir l'ensemble de mes articles sur cette successions de faits divers et de manifestations en cliquant sur le mot-clé Villa Soldati dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus.